samedi 11 octobre 2008

Entreprises et ONG : comment travailler ensemble ?

Il y a les ONG qui refusent catégoriquement tout compromis avec les entreprises par peur de la corruption ; celles au contraire qui considèrent qu'une collaboration plus ou moins poussée avec les firmes est nécessaire pour faire changer les comportements. Le dernier colloque du World Forum a abordé la question délicate des interactions entre ONG et secteur privé.

"Par rapport aux enjeux du développement durable, ça me paraît encore très notoirement insuffisant. Il faut qu'on aille beaucoup plus loin." Damien Deleplanque, PDG du groupe Adéo, ne mâche pas ses mots : hormis l'expérience d'un magasin test qui a supprimé tous les pesticides de son rayon jardinage, l'objectif "developpement durable" est encore loin d'être atteint. Et pourtant, "c'est une expérience généralisable et les alternatives sont possibles", affirme Damien Deleplanque, qui assure : "Les entreprises comme la mienne ont un rôle extrêmement important à jouer sur l'évolution des mentalités."
Même constat chez Michiel Leijnse, manager de Lipton, qui assène comme un slogan : "Nous n'héritons pas de la Terre de nos parents, nous nous préparons à la léguer à nos enfants." Selon lui, l'entreprise a tout à gagner à travailler main dans la main avec les ONG, car si une organisation à but non lucratif apporte une certification à ses produits, cela instaure une meilleure relation entre la firme et ses consommateurs. Et d'ajouter : "L'indépendance de l'ONG vis-à-vis de l'entreprise est très importante pour que la certification soit jugée crédible."
Dans les faits, une ONG peut-elle réellement collaborer avec une entreprise sans perdre son indépendance ? Pour Chris Harris, de Greenpeace, les ONG qui acceptent de l'argent de la part du secteur privé courent un gros risque. Son organisation ne fait "aucun compromis" sur le sujet, et tous les fonds proviennent de ses membres et de fondations indépendantes. "Quand on accepte l'argent d'une organisation et que l'organisation fait quelque chose qui ne vous plaît pas, vous vous compromettez d'une manière ou d'une autre", affirme-t-il.

"On a besoin d'ONG totalement indépendantes"
Scott Poynton, PDG de Tropical Forest Trust, est moins catégorique : 50% de ses revenus proviennent du secteur privé. "On ne s'interdit pas de dire quand une entreprise travaille mal, mais on ne s'interdit pas non plus de dire quand elle travaille bien", nuance-t-il, avant d'ajouter : "On a quand même besoin d'ONG totalement indépendantes, comme Greenpeace, pour créer le scandale, éveiller les consciences, secouer."
Pour Nancy Dale, d'Action Against Hunger : "On a besoin du secteur privé en tant que partenaire : l'investissement privé dans les pays en développement est aujourd'hui plus important que l'investissement de la communauté d'assistance aux pays en développement." Et finalement, c'est tout bénéfice pour les entreprises... "Faire de bonnes actions fait aussi du bien aux comptes de l'entreprise, car les consommateurs sont curieux de savoir ce que la firme fait dans le secteur du développement durable."
Quant à savoir si les ONG et le secteur privé constituent encore deux entités bien distinctes, les intervenants jugent globalement les limites de plus en plus floues. "Nous avons des employés qui travaillent pour Tropical Forest Trust et au sein du marché privé, témoigne Scott Poynton. Il y a de plus en plus d'organisations où la frontière n'est plus si évidente."

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